Anne Lacouture dans la suite de sa dernière exposition : « Menteur Menteur » explore l’oubli et ce qui revient malgré nous à la surface.
Qu’elle part de volonté dans l’oubli ? Que retenir de nous ?
Comment certaines choses passent de l’anecdote au mythe, traversant les générations dans l’impermanence du monde ?
Pourquoi certaines choses s’inscrive comme indélébile ?
Est ce un rêve qui me surprend au détour de la vie?
Comment cela me transforme au cours de ma vie?
© Anne Lacouture
Dans cette nouvelle exposition: « Feuille songe« , faite de papier, de fil, de feutrine, d’encre, de mine de plomb, de pensées cachées, se dessine ni traces, ni archives mais les mécanismes de l’oubli, jeux de cache cache à qui perd gagne.
« Feuille songe« , en créole de la Réunion pays d’origine d’Anne Lacouture, est une plante comestible en partie souterraine: la tubercule, et en partie aérienne : les feuilles.
L’une se mange, la racine, s’assimile lentement dans le corps, secret indicible, motif en évolution d’un ADN qui se transmet.
L’autre, la feuille ne laisse rien passer, imperméable à tout, elle se jette à la fin.
Plante étrange dont le mot revient au détour sur la langue, à la permanence du goût d’une inversion silencieuse.
© Anne Lacouture
Anne Lacouture déploie le motif en six tableaux et quatre volumes.
L’un « Onantsira« , le scalp, le trophée, conscience des mots / des maux. Oeuvre de 2m2 suspendue composée de fils enfermant dans leurs rets de petits papiers dans de petites poches.
Cet ensemble de faits s’inscrit tout au long d’une année: actualités, pensées, émissions de radio, télévisées, secrets, faits divers, articles de presse.
L’oeuvre non finie reste en évolution.
À l’opposé la » Méduse » faite de fils rouges, de feutrine, de papier, sur un motif de tondo reprend le thème des secrets mais cette fois, ceux de l’enfance: boîte à secrets, boîte aux trésors, carnet intime.
© Anne Lacouture
Ils sont sans valeur mais forts des désirs de l’enfance, investis de pouvoirs.
Tous ces messages enfouis, tout au long de notre vie sont des parties de rituels portatifs de nos mythologies personnelles.
Ils viennent du plus profond de notre être, d’un organe non encore découvert siège des sentiments.
Dans la troisième sculpture Anne Lacouture nous en offre une représentation, une cartographie à partir de fruit séché transpercés de clous.
La 4 ème sculpture, labyrinthe fait de fils rouges représenté par la « Forêt du Maïdo« .
Forêt, aux milles sentes de montagne, formée de tamariniers rouges.
C’est la forêt où Dante s’est endormi au milieu de sa vie pour s’éveiller à une nouvelle quête.
Cet ensemble de 4 sculptures sont les voies par lesquelles il faut abandonner quelques chose pour choisir telle ou telle direction.
© Anne Lacouture
Enlever, oublier pour se construire l’autre partie de l exposition formée de six stations dessinées: « Les accords perdus« , « les jours de mistral« , « j’ai oublié« , « l’apparat« , « familly« , » humus« , montre comment à partir de légères transformations successives s’opèrent les mutations de notre être, comme chez Boris Vian ou Kafka.
Le tamis de nos oublis nous transmue.
Nous ne le percevons pas toujours mais ça gratte aux entournures.
Notre être est debout à travers, à travers tout.
Cela déchire la trame des attentes et des possibles. nous sommes devenus nénuphar, cafard, arbre, plante…
Ici le dessin juste est une trace où se lit le langage.
Alors il s’inscrit comme vérité.
C’est ce qui permet d’aller à l’autre.